Elle a un extrême souci de tout ce qui se passe au-dedans d'elle,
elle est dès le départ
beaucoup plus opaque à ses propres yeux,
plus profondément investie par le trouble mystère
de la vie, que le mâle.
Du fait qu'il a un alter ego dans lequel il se reconnaît,
le petit garçon
peut hardiment assumer sa subjectivité;
l'objet même dans lequel il s'aliène devient un
symbole d'autonomie,
de transcendance, de puissance: il mesure la longueur de son pénis;
il
compare avec ses camarades celle du jet urinaire; plus tard, l'érection,
l'éjaculation seront
sources de satisfaction et de défi.
La petite fille cependant ne peut s'incarner dans aucune
partie d'elle-même.
En compensation on lui met entre les mains,
afin qu'il remplisse auprès
d'elle le rôle d'alter ego, un objet étranger : une poupée.
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La grande différence c'est que, d'une part,
la poupée représente le corps dans sa totalité
et que, d'autre part,
elle est une chose passive.
Par là, la fillette sera encouragée à s'aliéner
dans sa personne
tout entière et à considérer celle-ci comme un donné inerte.
Tandis que le
garçon se recherche dans le pénis en tant que sujet autonome,
la fillette dorlote sa poupée
et la pare comme elle rêve d'être parée et dorlotée;
inversement, elle se pense elle-même
comme une merveilleuse poupée